Par chance, il faisait beau. Encore heureux, sinon Leah l'aurait regretté. Ses vêtements et ses cheveux ne DEVAIENT pas prendre l'eau, surtout pas. C'était une question de vie ou de mort. Et puis, elle avait son ombrelle sur elle, s'il avait plu, elle aurait dû ouvrir son sac et la mettre dedans, parce que ce n'était pas n'importe quelle ombrelle! C'était un objet de collection, et elle avait décidé de se présenter au pensionnat dans sa tenue la plus belle, ce qui impliquait d'avoir cet accessoire. Donc, la pluie aurait fait rater son entrée en scène. Heureusement ce n'était pas le cas. Elle se recoiffa tout de même une fois encore, persuadée d'avoir un cheveu qui était mal placé, sans même le voir.

A côté d'elle se trouvait Machitsute Areku qu'elle devait énerver à force de lui parler de son style vestimentaire et de ce qu'elle allait mettre le lendemain. C'était son correspondant. Eux deux n'avaient rien en commun, mais ils étaient tout de même en bonne entente. Parfois, elle se demandait pourquoi elle était tombée sur un tel garçon. Elle n'en savait rien, mais s'en fichait pas mal au final. Ce qu'elle voulait, c'était qu'il ne l'embête pas, qu'il ne s'oppose pas, et qu'il reste tout gentil, tout mignon avec elle. Seulement, elle savait que ce n'était pas toujours le cas. Mais lui avait le droit, car lui était différent des autres à ses yeux: un vrai ami.

Les deux adolescents avaient fait le voyage ensemble, inscrits dans ce même pensionnat, pour une raison un peu mystérieuse, qui sûrement cachait quelque chose. Leah avait d'ailleurs promis qu'elle la trouverait. Ce ne pouvait pas être un pur hasard de tomber sur lui dans le train, et qui plus est, allant au même endroit pour ses études. Mais ça ne la dérangeait pas, au contraire, au moins, elle connaissait quelqu'un. Si elle ne trouvait personne avec qui "jouer", ce serait bien avec lui qu'elle "jouerait"...

-Quel formidable voyage en ta compagnie, dis donc!

Son cheveu l'exaspérait, il fallait qu'elle en ait le coeur net. Elle s'arrêta, se tourna vers lui.

-J'en ai un qui part comme ça, dis moi si j'ai raison.

Ce cheveu, s'il le fallait, elle l'arracherait, mais elle ne le laisserait pas comme ça, non. Elle n'aimait pas ces imperfections. Ni sur ses vêtements. D'ailleurs, elle notait ce qu'elle allait porter sur une feuille toujours une semaine à l'avance. Et au cas où le temps ne serait pas favorable, elle avait la fiche numéro 2, de rechange.
Leah regardait le pensionnat, elle sentait qu'elle allait bien s'amuser...

Pourquoi s'étaient-ils rencontrés dans ce wagon, qui plus est, pile côte à côte, quelle surprise ça avait été de la voir ici, mais depuis qu'elle s'était assise à côté de lui, elle n'avait cessé de parler, certes, ils ne s'étaient pas vus depuis longtemps, mais au bout de 4 heures de train, ça devient presque agaçant d'entendre une seule personne parler. Mais cela ne dérangeait pas Areku, préférant écouter que parler, notant tout ce qui peut être intéressant dans sa tête.
Heureusement, elle avait l'air de se fatiguer de parler et abordait maintenant le thème des vêtements, comme ce qu'elle allait mettre le lendemain.
Il faudrait quand même éclaircir cette affaire, ce n'était sûrement pas un hasard si ils avaient fait le chemin ensemble.

Ça faisait bien longtemps que Areku avait cessé d'écouter attentivement ce que Leah lui disait. Il suçait tranquillement sa sucette en pensant à tout autre chose, sa dernière sucette d'ailleurs, il faudrait qu'il en rachète. Il hochait quelquefois la tête pour faire comme si il écoutait, mais son esprit était perdu dans les méandres de son enfance, il ne savait pas pourquoi il repensait subitement à ça, peut-être car c'était une espèce d'école, mais cela n'avait pas d'importance.

Areku arrêta de penser à cet épisode de sa vie et observa la jeune fille.
Elle était dans une tenue impeccable et tenait une ombrelle dans sa main, sûrement achetée à prix d'or par ses parents, elle se recoiffait sans arrêt, mais cela ne gênait pas Areku, il avait l'habitude, après tout, elle était tellement maniaque.
Il observa son visage, elle avait vraiment un très beau visage, il se surprit à penser qu'elle était très belle, cette pensée le dérouta un moment; il voyait Leah comme une amie et non comme une future conquête...

Soudain elle se stoppa net et se tourna vers Areku.

-J'en ai un qui part comme ça, dis moi si j'ai raison dit-elle.

Areku la regarda en souriant, ce sourire habituel qu'il avait l'habitude d'arborer en tout moment et en tout lieu, comme pour se leurrer lui-même.

-Ne t'inquiètes pas, tu es parfaite.

Mais elle s'était déjà retournée et regardait le pensionnat en souriant. Elle avait raison, ce pensionnat était magnifique, un chef d'oeuvre architectural, tout comme le jardin, Areku pouvait même citer le nom en latin de chacun des arbres. Utilité? Strictement aucune.

Oui, elle avait raison, Areku sentait qu'ils allaient bien s'amuser.


Quelque chose atterri sur l'épaule du jeune garçon. De l'eau? Il leva la tête: effectivement, quelques nuages commençaient à investir le ciel. Il fallait se presser, sinon Leah allait être dans une rage folle, et c'était sur lui que ça allait retomber.

-Pressons le pas, veux-tu? dit-il en souriant encore une fois

Le pensionnat était tout de même un bâtiment splendide. Grand, robuste, à l'architecture complexe. Un bâtiment comme Leah les aimait. Elle se demandait surtout ce que contenait ce pensionnat. Qui d'autres y avait-il dans cet endroit qui lui paraissait si intriguant? Ce qu'elle voulait, c'était s'imposer, mais elle en avait l'habitude.

-Ne t'inquiètes pas, tu es parfaite, entendit-elle

Areku dut croire qu'elle ne l'avait pas entendu, car elle fit mine de rien. Mais intérieurement, elle fut touchée pour ce compliment. Quand on disait du bien d'elle, elle ne réagissait pas ou envoyait balader, car soit elle trouvait cela faux, soit elle le gardait pour elle et ancrait ces paroles dans sa tête pour pouvoir se dire: "Il a dit ça de moi". Leah avait une bonne mémoire, et ce que venait de dire son ami resterait gravée. On lui disait souvent qu'elle était belle, mais seules les personnes qu'elle appréciait vraiment réussissaient à la convaincre. Si elle souriait comme ça, face au pensionnat, ce n'était que parce que ce compliment lui réchauffait le coeur (et aussi un peu à l'idée de rencontrer des gens avec qui jouer...).

Soudain, elle reçut une goutte qu'elle ne remarqua pas. Au même moment, Areku s'exprima car il avait dut en sentir une, lui.

-Pressons le pas, tu veux?

Elle leva les yeux vers le ciel. Elle sourit encore une fois, pour le soin que son ami lui portait. Toujours là pour elle, toujours amical, même embêté par ses caprices. Car elle le savait, que parfois, elle l'ennuyait. Mais c'était plus fort qu'elle. Et là, elle sentit une goutte. Cette fois, son sourire s'effaça. Son ombrelle! Ses cheveux! Qu'allait-elle faire?!

-Porte-moi! Vite! Il faut rentrer!

Si Leah s'emballait comme ça, c'était aussi parce qu'elle avait une peur bleue de l'eau de pluie, plus particulièrement des grandes surfaces d'eau. Mais la pluie faisait partie de sa phobie. Elle sauta sur le dos d'Areku, car le sol commençait à se mouiller...

-Porte-moi! Vite! Il faut rentrer!

Areku émit un léger soupir, encore sa phobie de l'eau qui la reprenait, c'était d'ailleurs assez paradoxal étant donné qu'un être humain est fait à plus de 70% d'eau, m'enfin, cela n'avait pas d'importance, il fallait la "sauver" de l'eau "démoniaque".

Areku vit Leah se cramponner à son dos, il fut surprit par son poids, étonemment léger.

-C'est parti !

Areku se mit à courir avec Leah sur son dos, il se demanda de quoi ils avaient l'air, elle en train de paniquer et lui en train de courir le pus vite possible devant une toute petite averse.

C'est en pensant à cela qu'Areku trébucha sur une pierre, ce n'était pas tellement étonnant, il lui arrivait souvent de se prendre les pieds dans un quelconque obstacle et de tomber, mais cette fois-ci c'était différent, il avait Leah sur son dos.
Il essaya donc de se rattraper tant qu'il pouvait dans sa chute. Il réussi à se stabiliser à peu près pour maintenir Leah droite, mais ses genoux allaient toucher le sol très bientôt.

3...2...1... Crrrrrr (bruit des genoux se râpant sur le sol, CQFD)

Ses genoux heurtèrent le sol violemment, mais Leah n'était pas tombée, et c'est ce qui importait le plus.
Areku se releva le plus vite possible et fonça vers le hall d'entrée.

Il y arriva enfin après de nombreux efforts.

Areku posa Leah à terre, dans cet endroit sec et protégé de la pluie qu'est le hall.
Il regarda ses genoux: Son pantalon était déchiré et désormais ensanglanté, il s’affligea de la perte de son pantalon, il avait prit son plus beau pantalon pour faire une belle entrée au pensionnat, au lieu de cela, il était là, essoufflé, le pantalon déchiré et ensanglanté, les genoux dans un aussi bon état que son pantalon.

Malgré la douleur qui le poignardait aux genoux et l'état déplorable dans lequel son cher pantalon se trouvait, il réussi quand même à se retourner vers Leah qui n'avait plus dit un mot depuis que la pluie avait commencé à tomber et sourit encore une fois.

-C'est bon, tu es saine et sauve.